lundi 6 mars 2023

La paix à défaut de la vérité ?

La sortie du film " La syndicaliste" de Jean-Paul Salomé arrive à point nommé et pourrait sonner comme le point d'orgue de l'histoire de Maureen Kearney plus réelle que son incarnation, Isabelle Huppert.

L'effroyable chemin de croix de cette défenseuse des salariés d'ex Areva, adapté, selon son témoignage en version " light " au cinéma laisse un arrière-goût amer pour qui attache de l'importance à la notion d'équité.

Maureen Kearney & Isabelle Huppert - DR

Victime au départ d'une agression surréaliste à son domicile pour avoir gêné des enjeux qui la dépassaient, cette lanceuse d'alerte, ( dont la mère a participé à la libération de Nelson Mandella ) se trouve retournée comme une crêpe en posture de coupable pour dénonciation mensongère. Le long cheminement de ( partielle ) réhabilitation est efficacement retransmis dans un film implacable.

Entre la paix et la vérité, elle choisit au départ, pour protéger sa famille, de lâcher prise, sous la pression des policiers zélés. Le suspens est entretenu tout au long du film et chacun s'interroge, y compris son mari, sur la véracité des faits; jusqu'au jour où une affaire semblable sera retrouvée, avec même mode opératoire.

Celle de Marie-Lorraine Boquet-Petit, femme d'ingénieur de Véolia, agressée dans les mêmes conditions le 22 juin 2006 dans les Yvelines.

L'occasion de s'interroger sur la manière dont est rendue la Justice en France, surtout quand le contexte dépasse de loin tout ce que peut imaginer l'entendement humain.

Quand l' Intérêt supérieur de l'Etat prévaut sur la sécurité élémentaire des lanceurs d'alerte, on comprend à quel point il est nécessaire de les protéger à minima si la cause est juste.

Sujet probablement aussi de philosophie quand la paix devient plus importante que la vérité. Histoire de sauver sa peau.

Surtout quand les agresseurs courent toujours dans l'impunité la plus abolue.

Un film d'utilité publique à n'en pas douter.


jeudi 2 février 2023

" ARBEIT MACHT FREI " ?

 Il est des slogans si connotés qu'on aimerait disparus à jamais et qui pourtant reviennent à l'esprit dans des temps où la valeur Travail est discutable, tant sa notion a évolué avec le temps.

Ce slogan, censé détourner les joueurs et les fraudeurs de la seconde partie du 19 ième siècle, fut tristement repris par les nazis dans les années 30. Inscrits à l'entrée des camps de concentration, ce détournement de valeurs ne donne pas vraiment un goût de "revenez-y".

Avant même, il tentait de justifier le Goulag en 1920 sur les îles Solovki dans le style "Par le travail, la liberté" ...

Autant dire que ce mot, qu'il soit allemand ou autre, revêt des significations bien différentes selon la variété des contextes. Un peu comme le symbole de la Svastiska, détournée par les nazis, dont se sont inspirés les basques dans leur lauburu ou les bretons avec leur triskel. Le sens vers la gauche ou la droite indiquant la paix ou la guerre.

Pour en finir avec une liste qui n'en finirait pas, ce slogan fut même adopté par un groupe rock "Les rats".

A chacun son inspiration. Artistes ou pas.

Toujours est-il que par les temps qui courent, le rapport que chacun entretient avec le travail a bien évolué. Ne pas prendre le temps nécessaire de considérer et d'analyser cette évolution risque de mener certains  droit dans le mur.

On aura bien compris qu'avec cette valeur, autant prendre son temps pour affiner le contexte si l'on veut y comprendre quelque chose. Qu'il rende libre ou qu'il asservisse, ses modalités et ses conditions doivent être observées à la loupe si l'on veut avancer. A la loupe d'un coté, et avec le recul de la longue vue de l'autre. Exercice complexe mais pas impossible.

Inutile de dire que son rythme ne suit pas forcément celui  du train (de vie) des sénateurs à l'abri de tout ou presque ! Surtout que le ridicule ne tue plus.

vendredi 27 janvier 2023

L'effet celte !


 Mars 1923 sur une île isolée au large de la côte Ouest d'Irlande. L'île imaginaire d'Inisherin.

Ce chef d'oeuvre cinématographique de Martin Mac Donagh  (nominé entre autre  pour les futurs oscars)  ne ressemble à aucun autre et c'est bien là son surprenant intérêt . Ben Davis , le directeur de la photo a su sublimer  avec brio un territoire hors norme qui donne aux humains leur caractère si atypique. Baigné de culture celtique, il donne la part belle aux légendes celtes et toute leur puissance sur les personnages. La vierge, les croix celtiques et les sorcières (Les Banshees)  prennent ici autant de place que les animaux dont la présence revêt la même importance que celle des humains. Que ce soit le border collie, l'âne miniature ou le cheval.

Dans ce cadre hors norme, se décline la fin d'une histoire d'amitié entre un violoniste , Colm (Bendan Gleeson) et Padraic (Colin Farrel époustouflant). L'artiste décidant presque du jour au lendemain de briser son amitié qu'il estime creuse avec Padraic, un vrai gentil. Ce dernier cherche en vain à comprendre le revirement de son ami pour lui inexpliquable. Selon l'artiste, son ami serait devenu "creux" et sans aucun intérêt . Seule la trace artistique importerait selon lui pour la postérité. Un discours que ne comprend pas le héros du film, ancré dans la simplicité des rapports humains et foncièrement gentil.

De cette incompréhension naîtra une escalade d'incidents de plus en plus glauques.

Les trois rôles principaux brilamment interprétés par Colin Farrell, Brendan Gleeson et Kerry Cender sont entourés d'excellents seconds rôles comme l'épicière intrusive de l'île, le policier violent ou son fiston Dominique, un peu perdu.

Sur ce territoire avec fonds de guerre civile irlandaise, les caractères bien trempés s'échauffent, l'alcool aidant. Des  drames couvent, prédits par la sorcière. Un espace qui devient de plus en plus intenable pour les personnages féminins qui se réfugient dans la lecture.

Avec un titre à coucher dehors, ces "Banshees d'Inisherin" laissent une empreinte indélébile à tous ceux qui plongent avec eux dans cet "entre deux mondes" propre aux îliens, qui plus est celtique !

Un voyage à couper le souffle au plus profond des êtres et des paysages à la fin de la guerre civile irlandaise.

A ne pas manquer en ce début d'année .


mardi 20 décembre 2022

" Inception " ?

 Nouveau trouble à l'ordre du jour : la fatigue informationnelle !

Quand deux tiers des français accèdent à l'information via les divers réseaux sociaux en temps réel sans recul aucun, le risque addictif n'est plus très loin.
Sans parler des feuilletons médiatiques institutionnalisés avec effet déformant assuré sur les faits divers, la guerre en Ukraine, le décès de la reine d'Angleterre, etc. etc. etc. 

La liste est infinie voire exponentielle.

Nouvel écueil de cette lassitude généralisée : la défiance, le repli voire le complotisme.

Entre décervelage programmé et écueil de repli total, le risque augmente à la vitesse du mur du son.

Les contre-feux existent pourtant bel et bien mais sont rarement appliqués en matière de prévention : la loi du 8 juillet 2013 qui impose aux professeurs des C.D.I des collèges d'apprendre aux élèves à hiérarchiser et trier l'information est rarement appliquée.
Quant au webmedia qui devraient exister dans chaque collège pour sensibiliser les jeunes au tri de l'information, idem.

Une piste intéressante évoquée par une journaliste de La Croix consisterait à apprendre aux élèves le fonctionnement de leur cerveau face à l'exposition non maîtrisée des écrans, qu'ils soient télévisuels ou téléphoniques. L'injonction classique du "connais-toi toi même" serait elle la parade ?

Le revers de cette médaille de progrès numérique se manifesterait donc par le risque d'une addiction supplémentaire à ajouter à la longue liste établie ? 

Comme avec chaque outil, le mode d'emploi compte autant que l'outil lui-même.

Sans cela, les risques de confusion prennent le dessus sur les bénéfices.
Restent les psys en tous genre qui écopent pour éviter cette noyade assurée avec une patientèle de plus en plus nombreuse !

A moins qu'eux mêmes ne se noient dans cette vague informationnelle ?

"Science sans conscience n'est que ruine de l'âme"  écrivait il y a bien longtemps Gargantua à son fils Pantagruel .

E si François Rabelais avait raison ?

mercredi 14 décembre 2022

Vous avez dit " natalophobie " ?

 Parmi la pléthore d'étiquettes collées sur le moindre trouble, surmédicalisation oblige, on trouvera cette année dans la hotte du Père Noël , ces cinq syllabes surréalistes : na-ta-lo-pho-bie ! 

Un énième gros mot qui nous fait immanquablement penser à la nativité si l'on s'attache uniquement à sa consonnance . Il s'agit en fait d 'un rejet systématique des festivités de fin d'année imposées par le rituel , qu'il soit laïque ou chrétien .

D'éminents spécialistes en la matière ont donc recherché les causes profondes -ou pas- de cette attitude pour le moins anticonformiste . Les raisons s'avèrent plurielles sans doute aussi diverses que les individualités qui vivent, subissent ou choisissent ce "phénomène" pour ne pas dire trouble pathologique.

Refus de faire la fête sur commande, radinerie maladive, sentiment de non appartenance au groupe ?

Les motivations avouées- ou pas -sont légion !

De là à consulter pour " soigner " cette aversion saisonnière, il y a pas !

D'aucuns ne supportent plus les crêpages de chignon rituels autour de cadeaux peu appropriés et souvent à côté de la plaque; d'autres souffrent du " cinéma " mécanique et sans profondeur mis en scène par notre société de sur -consommation . 

Quand le réel ne colle plus avec l'image d'Epinal, le malaise se ressent pour tous ces natalophobes de service.

Les célibataires sont sommés de passer outre les sempiternelles questions familiales " alors, toujours pas trouvé l'âme sœur ", les aigris cyniques partent à l'autre bout du monde voir s'ils y sont, et dans le pire des cas, certains mettent fin à leur jour, las de jouer la comédie humaine.

Ceux-là mériteraient évidemment  de trouver l'antidote universelle de toute urgence.

Quant aux autres, qu'ils soient croyants ou pas, le mieux reste d'assumer cet instinct non grégaire .

A moins de créer l'association des " natalaphobes " anonymes pour conjurer le sort ?

En tout état de cause, joyeux Noël à tous, que vous le vouliez ou non !