A l'heure de l'inauguration de la Cité Internationale de la Langue Française au château de Villers-Cotterêts, cette interview très locale pour ne pas dire " viscinale " de Bigorre , d'un normand de naissance, amoureux de la langue française, poète à ses heures et panetier de son état :
Bonjour ainsi tu es poète ?
Oui, Dieu m'a fait ainsi, dans une
difficulté à aimer les maths et avec une certaine
aisance pour jouer avec les mots.
Est-ce depuis longtemps ?
Depuis mon enfance, je suis né dans
une ferme et la poésie poussait d'elle même, la
nature en regorge. Je ne faisais que la capter, la
respirer avant de la restituer avec mon coeur, ma
tête et mes sens.
Tes parents étaient férus de
poésie ?
Ils étaient laborieux, tous deux les
mains caleuses et le verbe paysan parfois patois
et de bonne éducation chrétienne.
Ils t'ont initié aux travaux de
la ferme ?
Certes oui, je passais du champ à
l'étable, du verger au poulailler, je savais
imiter le chant des animaux et je vibrais de tous
mes pores à chaque merveille de la création, les
ordinateurs n’existaient pas, aucune image
artificielle ne ternissait mon âme...
Comment devient-on poète ?
On devient poète si l'on est
un rêveur, un penseur, un amoureux d'une langue et si possible
un amoureux du "verbe fait chair".
Il faut avoir vécu dans du
beau ou du laid, baigné dans l'amour ou dans le mépris.
Il faut avoir tué la rancœur
dans le pardon des larmes ou être compatissant à la souffrance
de nos semblables.
Il faut un esprit rieur allié
à un cœur bon, il faut un peu d'instruction ou bien un bel
esprit curieux, espiègle sans doute.
Inné ou acquis ?
Inné parce que c'est un don
divin : certains sont diplomates, d'autres poètes, d'autres
sont des chefs, d'autres encore comptables.
Acquis ? oh non rien ne l'est
ici bas !
Le poète orgueilleux vit avec
une épée sur la tête, l'a v c ou l’Alzheimer le guette.
Le poète trop sérieux se
dessèche sous les lampadaires de l’embourgeoisement.
Le poète plagiaire finit par
se détester face à son miroir.
Le poète isolé de toutes
relations humaines ne voit plus que sa propre laideur, ses
mots sont des maux.
On ne peut pas acquérir des
vers comme on acquiert de l'argent, il faut savoir être canal
du bien comme le sourcier qui sonde les veines souterraines.
Attention cependant de livrer
son âme au vrai Dieu et non pas à son singe qui est le diable !
Comment définirais-tu la poésie ?
La poésie, la vraie, se compte en pieds, en alexandrins.
C'est
la véritable poésie, sculptée dans l'épaisseur de notre langue
française, qui est elle-même enracinée dans la langue latine.
Cet art là existe peu aujourd'hui car une conception moderne de la poésie a, pour le moment, supplanté l'originale.
Il
suffit à présent de monter un canevas de mots plus ou moins cohérents
avec des rimes pour fabriquer de la poésie moderne comme on fabrique de
l'art pictural avec un gribouillis de couleur.
Néanmoins,
le poète libre du XXI e siècle doit apporter une certaine fraîcheur à
l'intelligence de son lecteur pour prétendre à un art certain.
Que t'apporte-t-elle ?
Personnellement,
j'accouche ma pensée irriguée par mon coeur, je livre un peu de mon âme
heureuse ou triste à celui qui voudra me lire.
Je noircis une page avec tous les mots qui m'habitent à un instant T parce qu'un sentiment aura produit cela en mon for intérieur.
Comme
je ne peux pas livrer cela dans le langage banal de la vie quotidienne,
je grave une poésie à la manière d'une épitaphe sur le granit d'une
tombe.
J'ai envie de donner quelque chose à un lecteur potentiel et c'est tout.
A part ça, je n'aime pas les retours sur moi comme on n' aime pas entendre sa voix dans un enregistrement.
Petit discours francophile
Sous le soleil pâle d'automne,
Mots choisis pour une occasion,
Excepté celui de Cambronne,
Par eux, je livre mon émotion.
Tendres enveloppés de fleurs,
Fermes appuyés sur une racine,
Drôles, sortants à la bonne heure,
Serrés comme dans une boite de sardines.
Vous ne les aimez pas politiques,
Vous les aimerez autrement,
Chantant en bouquets poétiques,
Servis avec un verre de crémant.
Qu'allons nous faire de notre langue ?
Si raffinée, courtoise et conquérante,
Même si notre beau bateau tangue,
Elle ne devra jamais être dormante.
Les mots engagent toutes nos actions,
Ils s'ajustent dans notre labeur quotidien.
Les mots permettent à nos relations,
D'apporter la paix à notre méridien.
Il a fallu pour cela que le verbe s'incarne,
Dans notre pauvre chair désorientée,
Voulant éviter que notre âme se damne,
Notre Sauveur mort fut ressuscité.
M.L.
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