samedi 5 novembre 2016

« Arménie miraculée »

Du pays basque en Arménie, le voyage est d’autant plus aisé qu’il s’agit d’âmes soeurs, entre capacité de résistance à toute épreuve et volonté de dépassement des apparences : c’est ce que nous a proposé cet après-midi Henry Cuny, autour de son « essai  » : « Arménie, l’âme d’un peuple ».


Ce diplomate  retraité, journaliste et écrivain, qui a parcouru les cinq continents, a contribué, au fil d’anecdotes personnelles, à dévoiler la particularité de l’âme arménienne, via sept regards (parmi tant d’autres) sur ce peuple résilient.
Cofondateur de l’Université Française en Arménie, il en a présenté la genèse, avec cette exigence de responsabilité de destin imposé aux étudiants mixtes du cru, qui ne connaissaient pas la langue française : une gageure pour des jeunes sélectionnés dont certains maîtrisent la langue française à la perfection après trois ans d’étude ! .
De quoi faire pâlir certains ministres français qui pourraient puiser dans cette expérience inédite une source d’inspiration…C’est du moins une idée soufflée par un témoignage piquant du public.
Rien de mieux que la connaissance plus approfondie de ce berceau de la chrétienté pour en éviter les préjugés tels qu’une turcophobie présumée ou un enfermement sur son passé. L’art arménien illustre à merveille la modernité de sa puissance créatrice dont le peintre Sarian incarne un bel exemple.

Si, manifestement, cet ancien ambassadeur s’est fait plaisir en retraçant ses années immergées en terre arménienne, il n’en demeure pas moins  qu’il a su le partager avec un public essentiellement issu de la diaspora, mais pas uniquement …

mercredi 21 septembre 2016

21 septembre : journée d’Alzeihmer et/ou journée de l’invisibilité !


« A chaque jour suffit sa peine » : nous murmure ici à juste titre la « vox populi » .
Convocation à Pole Emploi à 9 heures dans une des plus belles régions de France, auprès d’un certain « P.V ». Soit.
Arrivée avec une demi-heure d’avance dans un local hyper sécurisé (il convient de laisser sa carte d’identité à l’accueil pour accéder aux toilettes), j’attends sagement mon tour ; le temps de décompresser d’une vingtaine de minutes passées dans les bouchons, entre deux rond-points bien connus des usagers.
Accueil des plus bienveillants par une jeune fille souriante chargée du service civique, qui ne cesse d’aller et venir entre les demandeurs d’emploi en quête d’informations.
Au bout de quarante minutes d’attente, je m’enquière auprès de cette jeune employée dévouée de vérifier si ma convocation est bien pour 9h00 ??
Après vérification sur la liste déjà pointée à mon arrivée, la préposée passe un coup de téléphone à P.V, sensé me recevoir.
Cinq minutes plus tard, un homme impassible me reçoit, me certifiant que je ne suis pas sur sa liste.
« Pourquoi vous-ai-je convoqué au fait » me demande-t-il, d’un ton neutre, une fois assis à son bureau.
C’est bien ce que je vous demande ! (mi amusée, mi consternée)……Surtout, remplir le dossier administratif pour cet employé inexpressif.
Au moment où j’ouvre la bouche, celui-ci me coupe sèchement en me rétorquant qu’il n’a que très peu de temps pour me recevoir, vu que je suis « invisible » et non avenue dans son emploi du temps.
Aucune excuse.
Nada.
Il est vrai que son temps est tellement plus précieux que celui d’une demandeuse d’emploi, quinqua, qui plus est !
Je réponds donc mécaniquement à ses questions administratives, apprenant que, de toutes façons, si je refuse de faire une heure de route pour un éventuel emploi, je serai purement et simplement radiée de la liste.
A cette nouvelle information, je me dis que je ne serai donc pas venue pour rien, enrichie de cette précieuse notification.
Pour une « invisible «, je sais au moins à quoi m’en tenir en cette journée dédiée à la cause d’Alzheimer.
Question dissuasion, ce P.V n’aurait pas fait mieux pour inciter la demandeuse d’emploi à quitter d’elle-même les statistiques encombrantes.
Non accueil oblige. Non allocations itou.
Son devoir administratif accompli, notre cordial employé me quitte en me souhaitant de trouver le plus rapidement possible un emploi.
Vœux pieux ou pas, je lui rétorque que je lui souhaite de trouver du temps pour écouter ceux qui, somme toute, le font vivre.
Ce n’est pas une question de temps, Madame, vous n’étiez pas sur ma liste, mais c’est bien d’avoir alerter l’accueil !
Sur que si je n’étais pas venue au rendez-vous, cet employé n’aurait pas oublié de me radier pour non présentation.
Quand l’humanité déserte à ce point celui qui est sensé œuvrer pour LE SERVICE PUBLIC, il ne faut pas s’étonner de la conjoncture morose.
A quand la journée de la « visibilité » ? Ah oui, j’oubliais, ALZHEIMER, sans doute !

Mais à chaque jour suffit sa peine ....

mardi 6 septembre 2016

« Le fils de Jean » de Philippe LIORET

La rentrée réserve parfois de belles surprises : cette reprise librement adaptée du roman « si ce livre pouvait me rapprocher de toi » de Jean-Paul Dubois, par Philippe LIORET, avec un titre aussi dense, ne pouvait qu’évoquer le thème de la paternité et de l’identité ; un thème des plus galvaudés en ces temps troublés, servi à toutes les sauces, y compris les plus indigestes.

Exception qui confirme ici la règle, dans ce film franco-canadien, où Pierre Deladonchamps , Gabriel Arcand, Catherine de Léan ou Marie-Thérèse Fortin sont tout simplement troublants.

Un jeune trentenaire, Mathieu, reçoit un jour un coup de téléphone inopiné qui va le mener au bout de lui-même et de son identité ; un prétendu ami de son père naturel, médecin canadien, le contacte, suite au décès annoncé, pour lui transmettre un tableau en héritage.


Instinctivement, le jeune père de famille parisien prendra l’avion pour Montréal, à la rencontre de son histoire qui remonte peu à peu à la surface; plus facilement en tous cas que le corps du prétendu géniteur, noyé dans un lac ; l’occasion pour le fils sans père identifié de recoller les morceaux de son identité jusque là floutée .

Surprise ici , non par le sujet du film, mais par la subtilité infinie avec laquelle il est traité, tout en jeu de non-dits et de regards fuyants , croisés, qui se retrouvent in fine.

L’intrigue est préservée jusqu’au bout et c’est tout en finesse que la vérité se recomposera, ménageant ainsi, les effets collatéraux qui auraient pu s’avérer dévastateurs.

C’était sans compter l’intelligence du scénario, du jeu tout en retenue des acteurs , justement éblouissants de délicatesse, de sobriété, pour ne pas dire d’humanité.

Du grand art !

samedi 27 août 2016

Le peintre de l’eau



On connaissait déjà la « note bleue » chez Chopin et Sand, on trouvera en correspondance « l’heure bleue » de CARLOS COBIAN, qui a su redonner au romantisme une image contemporaine ; en descendant se baigner à PORT-VIEUX le matin, dans les rues encore fraîches de Biarritz, une petite escale toute en simplicité s’impose à la Galerie PAGE au coin de la rue Mazagran. Pas de faux-semblants ici avec un accueil des plus authentiques d’une galeriste aussi hyper réaliste que les œuvres choisies exposées.

Des femmes de Volvic ou du Gard y présentent actuellement de délicates œuvres d’ entre-deux-mondes, ainsi qu’un peintre originaire de Madrid : CARLOS COBIAN.
Difficile au départ de distinguer l’art de la photographie plutôt que du trait précis du dessin : jeunes filles, enfants jouant au cerf-volants sur la plage de Biarritz, pour un spécialiste de l’atmosphère climatique du bord de mer.

A la manière de la Rose pourpre du Caire de Woody ALLEN, ou de Mary Poppins, le spectateur entre immédiatement dans le tableau, plus nature que la réalité elle-même !

CARLOS COBIAN pourrait passer pour « the spécialist » des atmosphères climatiques, parfois ensoleillées, parfois pluvieuses, toujours en mouvement. Sachant que le peintre ne travaille jamais après le lever du soleil ni avant le coucher.

Précision du trait et romantisme caractérisent ce peintre de la délicatesse humaine dont certains tableaux pourraient s’intituler « à l’ombre des jeunes filles en fleur ».

Les vagues des maillots marins féminins répondent aux vagues de Biarritz sous des cieux contrastés et nuancés : de quoi faire revivre l’âme romantique d’une ville replongée dans les années 30. Ses heures de gloire et de folie aussi.

A déguster cet été 2016, au 37 rue Mazagran, dimanche compris, dans un cadre sans chichi pompoms, pour l’amour de l’art, aux antipodes de l’art mondain.
Une gageure, surtout à Biarritz !

vendredi 26 août 2016

« La joie de vivre »


La joie de vivre par bande-annonce-film

La vacance des programmes ineptes de période estivale réserve parfois de petits miracles, notamment cet après-midi sur ARTE ; il arrive que l’on puisse tomber accidentellement sur une perle rare : il s’agit ici de l’adaptation cinématographique du 18ième roman de la série des Rougeon-Maquart de Zola, écrit lors d’une période sombre de son existence, à la disparition de sa maman et de Flaubert.
Quand on parle des autres, on parle toujours de soi, confiait Victor Hugo ; une maxime qui se vérifie sans doute ici où l’on perçoit les deux versants de la personnalité complexe de Zola, incarnés par l’optimisme de la petite orpheline de service, Pauline, et le pessimisme de son cousin velléitaire, Lazare.
Recueillie à la mort de ses parents chez son oncle et sa tante, les CHANTEAU, Pauline a développé une joie de vivre inaltérable mêlée d’une grande bonté, sans doute pour tenter de se faire un peu aimer. Riche héritière, elle sera dépossédée de sa fortune par la famille CHANTEAU, au profit de leur fils unique, qu’elle aime secrètement depuis son enfance.
Les enfants ici, victimes de la vénalité de leurs parents, se battront tant bien que mal pour que la pulsion de vie soit la plus forte. Zola dénonce ici les hypocrisies en tous genres de la bourgeoisie, plus prompte à préserver, coûte que coûte, ses intérêts qu’à faire éclater justice et vérité ; une vérité qui purifie tout comme le feu, écrivait-il pourtant déjà à son époque …
Le réalisateur des « émotifs anonymes » , J.Pierre AMERIS, a su mettre en valeur les obsessions de Zola, joie de vivre contre peur de la mort, avec une brochette d’acteurs tous plus justes les uns que les autres, dans un fabuleux décor maritime normand.
J.F BALMER, en Monsieur CHANTEAU touchant et authentique, qui souffre de la goutte, face à une Marianne BASLER, froide et impitoyable, qui ne pense qu’à l’avenir de son fils, pourtant si partagé et inadapté aux codes bourgeois.
A ce bébé, que le docteur pensait condamné à mort à l’accouchement de Louise, celle qui porte l’enfant de Lazar, s’oppose le victorieux triomphe de pulsion de vie, incarnée par l’orpheline, dépouillée, sacrifiée, mais salvatrice.
Une pure merveille !

mardi 19 juillet 2016

De l’identité juive en question …

Si Albert Londres incitait les journalistes à " tremper la plume dans la plaie ", le
réalisateur Yvan ATTAL n’aura pas reculé devant sa caméra pour 
l’immerger dans les abysses de ses angoisses existentielles : à savoir la problématique d’ une identité juive qui le taraude.
Même si elle est censée se transmettre par la mère, qu’en penser si ce n’est que le père qui est juif ?
Pour la forme, le résultat reste certes discutable, mais il n’en reste pas moins qu’il aura eu le courage et la sincérité d’affronter ses démons , ceux de ses ascendants, mais aussi et surtout ceux de notre société, plus prompte à exclure qu’à inclure.
L’humour juif, doué pour l’autodérision, fonctionne plus ou moins bien selon les sketches de situation qui se succèdent, avec une brochette d’acteurs hors pairs, de Denys PODALYDES à BENOIT POELWOORDE ( en militant frontiste qui se découvre une grand-mère juive ! ) en passant par YVAN ATTAL dans son presque propre rôle, de juif obsédé par …son identité !
Qui n’a pas oublié pour autant un rôle explosif pour Charlotte GAINSBOURG, remontée à bloc !
Peut-on rire de tout ? s’offusqueront certains ? Serait-ce la meilleure arme de déminage massif contre l’intolérance ambiante ? Avec une lucidité décapante, en prime.
Qui de mieux placé qu’un Raymond DEVOS pour railler les belges ou qu’un juif -de gauche -pour démonter tous les clichés de l’antisémitisme ambiant ?
Ce qui nous rassure, c’est qu’in fine, devant son psy , lui aussi juif, ( puisque Freud a inventé la psychanalyse ) YVAN ATTAL semble avoir calmé sa névrose identitaire, enfin prêt à jouer un rôle
de musulman à l’avenir !
Pas étonnant que la fondation ROTSCHILD soit partenaire du film, mais, avouons-le, c’est pour la bonne cause : l’amour d’une France , équilibrée, dans toute sa diversité.