lundi 10 avril 2023

" Normale " !

Lucie et son père tentent de se conformer aux apparences  - DR

Un titre inattendu pour cette comédie - dramatique d'Olivier Binet, adaptée d'une pièce de théâtre de David Greig ,intitulée "Le monstre du couloir".

Titre qui en dit long en tous cas sur le regard extérieur posé sur une relation père-fille aussi drôlatique que pathétique. Un titre surprenant aussi pour un des plus géniaux acteurs belges, Benoît Poelvoorde, qui incarne un père décalé, aimant, fragilisé par la sclérose en plaque. 

Les rôles s'inversent donc dans ce duo familial atypique où la collégienne Lucie, touchante Justine Lacroix, materne son père pour éviter le placement en foyer prévu par l'administration sociale.

Chacun tient à sa manière, souvent surréaliste et poétique dans un environnement fade, chacun dans son monde imaginaire. Lui s'évade en sous-sol avec  ses jeux de rôles, elle s'invente avec brio des histoires parfois à dormir debout ! Tous deux avec une poésie et l'énergie du désespoir qui les caractèrisent.

Derrière l'insoutenable légereté de leur feinte désinvolture se profile le profond désarroi face à l'inéluctable. Avec une imagination débordante, ils inventeront mille et un subterfuges pour déjouer le verdict d'une visite prévue de l'assistante sociale qui ne sera pas celle que l'on croit. Ils tenteront de s'adapter pour feindre les apparences auxquelles il convient de se conformer pour survivre.

Ce duo s'élargit en trio ensuite avec l'apparition d'un collégien lunaire décalé qui se cherche sur bien des plans ; il révèle en fait toute l'incroyable souffrance, hors norme, induite par les situations parfois bancales de la vie.

Ce titre, provocateur finalement, révèle en fait la volonté de "normalité" recherchée par les protagonistes dans une société des apparences souvent  trompeuses.

Dans un monde à l'envers, où les  "normaux" ne sont pas vraiment ceux que l'on croit, ce film remettra peut-être quelques pendules à l'heure quant à certains préjugés hautement toxiques.